Pierre Clément, Docteur en didactique de la biologie, Professeur de
didactique de la biologie à l`Université Claude Bernard Lyon 1 et ancien
directeur de ma thèse en cotutelle (UCBL1 & Université de Tunis, 2007)
Quand j’ai rencontré
pour la première fois Mohamed Kochkar, en 1998 à l’ISEFC de Tunis où j’allais
faire des cours de Didactique de la Biologie à la première promotion du DEA de
Didactique, il n’avait jamais entendu parler de l’épigenèse cérébrale, c’est à
dire de la façon dont nos neurones cérébraux se configurent en fonction de
notre histoire propre. Il découvrait alors que tout cerveau humain est a priori
capable de tout, d’apprendre n’importe quelle langue par exemple, et que ses
performances s’acquièrent en fonction de ce qu’il apprend à maîtriser :
langage, concepts, gestes, procédures … Changeux avait popularisé l’épigenèse
cérébrale dans son best-seller « L’homme neuronal » (1983). Je
faisais largement référence à ce concept dans mon cours, ainsi qu’à d’autres
concepts qui montrent que ce qui est vivant s’auto-construit en fonction de ce
qui l’entoure, et qu’émergent ainsi des pensées, des cellules et autres
structures adaptées ou encore des espèces nouvelles, sans qu’on ait besoin de
faire appel à un déterminisme simpliste de ces nouveautés qui auraient été
préfigurées par un programme, qu'il soit
génétique ou autre.
Mohamed Kochkar a été
ébloui par la pertinence de ce concept d’émergence, qui encourage à lutter
contre une pensée fataliste, qui permet de comprendre que chacun construit sa
propre pensée et qui suggère aux enseignants de mettre leurs élèves dans le
contexte le plus favorable pour qu’ils apprennent par eux-mêmes, pas en
récitant par cœur sans comprendre, mais en s’appropriant des connaissances et
valeurs qui leur permettront de résoudre nombre de leurs problèmes individuels
et sociaux. J’ai eu ensuite le plaisir d’encadrer le travail de thèse de
Mohamed Kochkar, focalisé sur l’enseignement, à des lycéens tunisiens, de ces
nouveaux concepts de la biologie, et en particulier de l’épigenèse cérébrale.
Et quand il m’a invité chez lui, j’ai eu l’immense surprise de voir, sur le
trottoir devant sa villa à Hammam Chott, le mot ÉPIGENÈSE gravé en lettres de
près d’un mètre chacune ! Je ne suis pas sûr que les passants qui marchent
sur ces lettres en comprennent le sens avant qu’il ne le leur ait expliqué.
Mais je sais qu’il aime l’expliquer. Il aime enseigner. Il aime éduquer. Il a,
depuis sa thèse, écrit plusieurs courts articles pour un large public. J’espère
vivement que les lecteurs apprécieront la conviction, voire la fougue de
Mohamed Kochkar quand il souhaite éduquer en partageant ces connaissances et
ces valeurs.
Source: Le système éducatif au banc des accusés ! « Les professeurs
ne comprennent pas que leurs élèves ne comprennent pas », Mohamed Kochkar,
2014, pp. 13-14 (Pour ceux ou celles qui souhaitent bénéficier d’une copie
électronique, il suffit d’envoyer son mail).
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