mercredi 16 juin 2021

Le cerveau de la femme n’est ni inférieur ni identique à celui de l’homme. Citoyen du Monde

 

 

Jalila Behi: « L`Humanité, l`homme n`en a que la moitié » (Editions Nirvana, 2003).

Je commence par une enquête que j’ai effectuée, en  2000, sur un échantillon composé de 275 personnes (étudiants et enseignants tunisiens). Dans  l’un des sujets de cette enquête, je suis arrivé au résultat suivant : 33 % des personnes interrogées affirment que le cerveau de l’homme est plus lourd que celui de la femme.

Les origines de ces conceptions non scientifiques et idéologiques pourraient venir des travaux de Broca et il se pourrait que les biologistes qui n’ont pas étudié l’épistémologie et l’histoire des sciences ne soient pas au courant des corrections de Gould.

En 1861, Paul Broca, éminent neurobiologiste français et chef de file de la craniologie, mesure le poids des cerveaux d’hommes et de femmes. Etant donné que les cerveaux des femmes étaient nettement moins lourds que ceux des hommes, Broca mit en relation cette « infériorité physique » avec ce qui était admis à cette époque : « l’infériorité intellectuelle » des femmes. Cent vingt ans après, Stephen Jay Gould, paléontologue américain, a ré-analysé les mesures originales de Broca et montré que les différences de poids de ces cerveaux étaient d’abord liées à la taille des individus, puis à leur âge, puis à la présence ou absence de méninges, etc. : le paramètre sexe n’intervient jamais !

Dans un ouvrage scientifique, « La mal mesure », Gould, 1983, a écrit : « Sur un total de 292 cerveaux masculins, Broca calcula que le poids moyen s’établissait à 1325 grammes et sur 140 cerveaux féminins à 1144 grammes, soit une différence de 181 grammes ou 14 %. Stephen Jay Gould a mis en évidence la fragilité des conclusions de Broca : le poids du cerveau diminue avec l’âge et les femmes de Broca étaient, en moyenne, nettement plus âgées que ses hommes. Le cerveau grossit proportionnellement à la taille et ses hommes avaient en moyenne presque 15 centimètres de plus que ses femmes. La différence moyenne entre le poids du cerveau d’un homme de 1.62 m et un de 1.93 m est égal à 113 grammes dans les données de Broca. Personne ne songe à considérer les hommes grands plus intelligents que les petits. ». Et personne ne songe à considérer le cachalot, mammifère marin, plus intelligent que l’homme parce qu’il a un cerveau de 10 kilogrammes.

Par ailleurs, d’autres travaux ont prouvé que, dans l’espèce humaine, il n’existe aucune relation entre le poids du cerveau et l’intelligence ou toute autre performance intellectuelle (Vidal, 2001). Mais plus d’un siècle de croyances craniologiques a marqué des générations d’enseignants et d’élèves, et s’est inscrit dans notre langage quotidien (« grosses têtes, petites têtes », « cerveaux d’oiseaux », etc.). Il n’est pas si facile de s’en sortir, et de faire passer le message que les performances cérébrales résultent des processus d’épigenèse au cours desquels se configurent et reconfigurent nos réseaux neuronaux en interaction avec les expériences vécues. Un réseau neuronal est un ensemble de neurones du système nerveux, qui ayant des données différentes, peut les combiner pour en déduire un état précis, par exemple, savoir de quelle force est la pression exercée sur la main, sa localisation.

Supposons que deux bébés vrais jumeaux abandonnés sont adoptés par deux familles différentes, l’un devient médecin et l’autre ingénieur. Si nous analyserons leurs cerveaux par imagerie médicale, on trouvera des réseaux neuronaux différents malgré leur similitude totale en poids, volume et nombre de neurones. Donc, c’est tout à fait normal qu’il existe des différences entre les cerveaux des hommes et ceux des femmes au niveau de la configuration des réseaux neuronaux. On sait maintenant que le cerveau influe sur le comportement et le comportement influe sur le cerveau. Donc les deux sont en interaction. Et on sait aussi que les hommes et les femmes n’ont pas le même comportement et ne vivent pas dans le même environnement.

Les  réseaux neuronaux du cerveau forment le support biologique des différences entre les opinions des hommes et des femmes. La maturation du cerveau dépend des interactions entre l’inné et l’acquis. Un singe n’atteindra jamais l’intelligence d’un homme même s’il vit dans le même environnement car tout simplement il n’a pas hérité un cerveau humain.

Le nombre de réseaux neuronaux n’augmente pas proportionnellement au poids du cerveau. Et d’ailleurs, le petit cerveau d’un oiseau, avec ses réseaux complexes, est capable de réaliser des performances formidables comme par exemple sa performance intellectuelle supérieure « chanter ».

 

Conclusion 

Le cerveau de la femme n’est ni inférieur ni  identique à celui de l’homme. Il me semble que les opinions non scientifiques sont très résistantes et qu’on ne peut pas  les changer seulement grâce à l’acquisition des connaissances exactes. Bien que l’information correcte (Le poids du cerveau n’a aucun rapport avec l’intelligence, mais il varie en fonction du poids du corps) existe dans le manuel scolaire officiel du bac, enseignants et élèves persistent à croire que l’homme est plus intelligent que la femme car son cerveau est plus grand.                                                                                  

 

Problématique : Comment peut-on changer ces   opinions sexistes qui favorisent les hommes aux dépens des femmes selon le volume de leur crâne  et le poids de leur cerveau ? Comment fonctionne donc notre cerveau ?

 

Source: Le système éducatif au banc des accusés ! « Les professeurs ne comprennent pas que leurs élèves ne comprennent pas », Mohamed Kochkar, 2014, pp. 137-140 (Pour ceux ou celles qui souhaitent bénéficier d’une copie électronique, il suffit d’envoyer son mail).

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