Jalila
Behi: « L`Humanité, l`homme n`en a que la moitié »
(Editions Nirvana, 2003).
Je
commence par une enquête que j’ai effectuée, en
2000, sur un échantillon composé de 275 personnes (étudiants et
enseignants tunisiens). Dans l’un des
sujets de cette enquête, je suis arrivé au résultat suivant : 33 % des
personnes interrogées affirment que le cerveau de l’homme est plus lourd que
celui de la femme.
Les
origines de ces conceptions non scientifiques et idéologiques pourraient venir
des travaux de Broca et il se pourrait que les biologistes qui n’ont pas étudié
l’épistémologie et l’histoire des sciences ne soient pas au courant des
corrections de Gould.
En
1861, Paul Broca, éminent neurobiologiste français et chef de file de la
craniologie, mesure le poids des cerveaux d’hommes et de femmes. Etant donné
que les cerveaux des femmes étaient nettement moins lourds que ceux des hommes,
Broca mit en relation cette « infériorité physique » avec ce qui
était admis à cette époque : « l’infériorité intellectuelle »
des femmes. Cent vingt ans après, Stephen Jay Gould, paléontologue américain, a
ré-analysé les mesures originales de Broca et montré que les différences de
poids de ces cerveaux étaient d’abord liées à la taille des individus, puis à
leur âge, puis à la présence ou absence de méninges, etc. : le paramètre
sexe n’intervient jamais !
Dans
un ouvrage scientifique, « La mal mesure », Gould,
Par
ailleurs, d’autres travaux ont prouvé que, dans l’espèce humaine, il n’existe
aucune relation entre le poids du cerveau et l’intelligence ou toute autre performance
intellectuelle (Vidal, 2001). Mais plus d’un siècle de croyances craniologiques
a marqué des générations d’enseignants et d’élèves, et s’est inscrit dans notre
langage quotidien (« grosses têtes, petites têtes », « cerveaux
d’oiseaux », etc.). Il n’est pas si facile de s’en sortir, et de faire
passer le message que les performances cérébrales résultent des processus
d’épigenèse au cours desquels se configurent et reconfigurent nos réseaux
neuronaux en interaction avec les expériences vécues. Un réseau neuronal est un
ensemble de neurones du système nerveux, qui ayant des données différentes,
peut les combiner pour en déduire un état précis, par exemple, savoir de quelle
force est la pression exercée sur la main, sa localisation.
Supposons
que deux bébés vrais jumeaux abandonnés sont adoptés par deux familles
différentes, l’un devient médecin et l’autre ingénieur. Si nous analyserons
leurs cerveaux par imagerie médicale, on trouvera des réseaux neuronaux
différents malgré leur similitude totale en poids, volume et nombre de
neurones. Donc, c’est tout à fait normal qu’il existe des différences entre les
cerveaux des hommes et ceux des femmes au niveau de la configuration des
réseaux neuronaux. On sait maintenant que le cerveau influe sur le comportement
et le comportement influe sur le cerveau. Donc les deux sont en interaction. Et
on sait aussi que les hommes et les femmes n’ont pas le même comportement et ne
vivent pas dans le même environnement.
Les réseaux neuronaux du cerveau forment le
support biologique des différences entre les opinions des hommes et des femmes.
La maturation du cerveau dépend des interactions entre l’inné et l’acquis. Un
singe n’atteindra jamais l’intelligence d’un homme même s’il vit dans le même
environnement car tout simplement il n’a pas hérité un cerveau humain.
Le
nombre de réseaux neuronaux n’augmente pas proportionnellement au poids du
cerveau. Et d’ailleurs, le petit cerveau d’un oiseau, avec ses réseaux
complexes, est capable de réaliser des performances formidables comme par
exemple sa performance intellectuelle supérieure « chanter ».
Conclusion
Le
cerveau de la femme n’est ni inférieur ni
identique à celui de l’homme. Il me semble que les opinions non
scientifiques sont très résistantes et qu’on ne peut pas les changer seulement grâce à l’acquisition
des connaissances exactes. Bien que l’information correcte (Le poids du
cerveau n’a aucun rapport avec l’intelligence, mais il varie en fonction du
poids du corps) existe dans le manuel scolaire officiel du bac, enseignants
et élèves persistent à croire que l’homme est plus intelligent que la femme car
son cerveau est plus grand.
Problématique : Comment peut-on
changer ces opinions sexistes qui
favorisent les hommes aux dépens des femmes selon le volume de leur crâne
et le poids de leur cerveau ? Comment fonctionne donc notre cerveau ?
Source: Le système
éducatif au banc des accusés ! « Les professeurs ne comprennent pas que
leurs élèves ne comprennent pas », Mohamed Kochkar, 2014, pp. 137-140
(Pour ceux ou celles qui souhaitent bénéficier d’une copie électronique, il
suffit d’envoyer son mail).
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