jeudi 10 novembre 2022

Couper la main du voleur est anti-coranique et contraire à la volonté de Dieu. Mohammed Talbi

 

 

Penseur libre en Islam. Entretiens avec Gwendoline Jarczyk, Mohammed Talbi,  cérès éditions, Tunis 2013, 422 pages.

Page 340: Je considère le texte coranique et prends par exemple un commandement du Coran tel que celui-ci : Versets 5 :38 : « Le voleur et la voleuse, à tous deux coupez la main, en punition de ce qu’ils se sont acquis un châtiment de Dieu. Dieu est puissant et sage…». Ces paroles figurent textuellement dans le Coran. Or, couper la main du voleur est devenu l’emblème de l’islam quand on le regarde de l’extérieur. On s’écriera donc : l’islam, c’est cela ! Je sais pertinemment que l’ablation de la main, comme sanction du délit du vol ; a bel et bien été pratiquée au temps du Prophète. Mais je sais également que, en une année de sécheresse, un disciple du Prophète, le deuxième calife précisément, décréta que l’on ne couperait pas la main des voleurs, la population se trouvant dans une nécessité telle que certains ne pouvaient s’empêcher de voler pour subsister. Autrement dit, le fait de couper la main du voleur est une affaire circonstancielle, une loi empruntée d’ailleurs à la Bible et du code de Hammourabi (1793-1750 av. J.-C.). Le deuxième calife, proche du Prophète et connaissant son esprit et sa mentalité, avait donc suspendu cette loi, dans la mesure où les circonstances faisaient qu’elle était inapplicable.

Page 342: Passons surtout au verset suivant, 5 :39 : « … Mais quiconque se repent, après avoir causé du tort, et fait preuve de bonne conduite, Dieu accepte son repentir. Dieu est absoluteur et miséricordieux » Ce verset est d’une évidence telle que je me demande comment la sanction mutilante par ablation de la main a pu se maintenir, et trouve encore des défenseurs. Dieu nous dit clairement que le repentir suspend, voire annule la sanction. Le but n’est pas de faire des manchots. Le but est d’amender. Celui qui se réforme, « fait preuve de bonne conduite » (aslaha), redevient un bon citoyen, « Dieu accepte son repentir ». En somme, Dieu accepte son repentir et pas le théologien-juriste qui a fabriqué la charia car il va contre Dieu. Dieu aime les hommes, ce qu’il veut c’est qu’ils s’amendent. « Il est absoluteur et miséricordieux », alors que ne l’est pas le théologien-juriste qui nous a légué la charia, et celui qui lui emboîte aveuglément le pas, se soumettant à l’autorité des anciens au lieu d’être à chaque instant, dans le hic et nunc, à l’écoute de Dieu.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire