Rendez à Montessori ce
qui appartient à Montessori ! Citoyen du Monde Dr Mohamed Kochkar, Coordinateur
Général Pédagogique de l’Ecole Montessori Internationale Tunisie - H-Lif
SVP,
ayez l`amabilité de répondre à ma curiosité suivante. Message facebook envoyé
par moi-même, le dimanche 15 février
2015 à mes chers professeurs et chers collègues :
- Pierre Clément, mon ancien directeur de
thèse et ancien professeur de didactique de la biologie à l`UCBL1.
- André Giordan, mon ancien professeur et
directeur du Laboratoire de Didactique et Épistémologie des Sciences (LDES),
à
Genève (il a remplacé Piaget dans ce poste).
- Lassaad Mouelhi, mon ancien camarade de
recherches et directeur du département des sciences de l'Education à l'ISEFC,
Université de Tunis.
- Saida Aroua, mon ancienne camarade de
recherches et Maître Assistant à la faculté des sciences de Tunis.
Pourquoi,
au cours de notre formation didactique qui a duré 8 ans (3 ans DEA et 5 ans
Doctorat, de 1999 à 2007 sous la cotutelle de l`Université de Tunis et
l`UCBL1), nos professeurs tunisiens et français n`ont jamais mentionné, même
pas une seule fois - du moins à ma connaissance - le nom de la pédagogue
italienne Maria Montessori ?
Pourtant
elle était une pionnière du socioconstructivisme de Piaget, des néopiagétiens
et de Vygotsky1 (la ZPD : la Zone Proximale de Développement). En
plus, ses écrits (l`esprit absorbant de l`enfant, 1959) renferme des idées
intéressantes sur « la fin du tout génétique » et sur la théorie de l`épigenèse cérébrale2.
Elle a aussi essayé de répondre à la problématique ancienne qui date de
l`antiquité : « Enseigner des valeurs ou des connaissances ? »3. Une
quatrième innovation pédagogique montessorienne que j` ai oublié de mentionner
dans mon message déjà envoyé aux destinataires cités ci-dessus et qui consiste
à décloisonner les niveaux et les disciplines enseignées
(l`interdisciplinarité)4.
Une
seule réponse m`est parvenue jusqu`
à la date de publication on line de ce
message (vendredi 20 février 2015) :
Le 15
février 2015 19:07, André Giordan <andre.giordan@unige.ch> a écrit:
Cher
Collègue,
Dans
ma présentation je cite parfois Montessori…
ci-joint
une de mes diapos… en haut à droite
Mais
si vous vous intéressez au socioconstructivisme, il vous faut regarder avant
Binet, Cramusel et surtout Claparède…
Eventuellement
Dewey…
Aujourd’hui,
il vous faut dépasser les constructivistes. On ne peut construire si on ne
déconstruit pas… Et l’obstacle principal est à ce niveau.
De
même, tout n’est pas cognitif dans l'apprendre, il faut travailler sur les 5
dimensions de la personne.
Bonne
soirée
qq
pistes
http://www.andregiordan.com/articles/apprendre/apprendre.html
Très
cordialement
André
Giordan, Professeur
Laboratoire
de Didactique et Epistémologie des Sciences,
Université
de Genève
Courrier
électronique <andre.giordan@unige.ch>
Site
personnel : http://www.andregiordan.com/
Site Web LDES:
http://www.ldes.unige.ch
Ma
signature
« Pour
l`auteur, il ne s’agit pas de convaincre par des arguments ou des faits, mais,
plus modestement, d’inviter à essayer autre chose » (Michel Fabre &
Christian Orange, 1997).
« À un
mauvais discours, on répond par un bon discours et non par la violence » (Le
Monde Diplomatique).
Date
de la première publication on line : Hammam-Chatt,
vendredi 20 février 2015.
Notes de bas de page :
1ère note de bas de page :
Page 183 : Maria Montessori :
« Nos écoles ont démontré que les enfants d`âges différents s`aidaient les
uns les autres ; les petits voient ce que font les aînés, et demandent des
explications que les plus grands leur donnent volontiers. C`est un véritable
enseignement, parce que la mentalité des enfants de cinq ans est si proche de
celle des enfants de trois ans que le plus petit comprend facilement, grâce à
l`aîné, ce que nous nous saurions lui expliquer aussi bien. Il y a entre eux
une harmonie et une communication comme il est rare d`en voir entre adultes et
petits enfants. ». Bibliographie : Maria Montessori, l`esprit
absorbant de l`enfant, Desclée de Brouwer, 1959 ; 2010 pour la présente édition,
241 pages.
2
ème note de bas de page :
Comparaison
de deux concepts biologiques : « l’épigenèse » chez Henri Atlan,
1999 ; et « la maturation » chez Maria Montessori, 1959. Citoyen du Monde Dr Mohamed
Kochkar
Maria Montessori : « Maturation »,
c’est plus que « la somme exacte des effets du gène opérant en un
cycle limité en soi »
(Kochkar : En épigenèse, c`est « La fin du tout génétique »,
Henri Atlan, 1999). Outre les effets du gène, le milieu sur lequel ils agissent
a, lui aussi, une part dominante dans la détermination de la maturation.
En ce qui concerne les fonctions psychiques, la maturation ne peut s’effectuer
que grâce à des expériences dans le milieu ; ces expériences varient selon
les différentes phases de développement ; l’horme (ce terme qui peut être
comparé à « l’élan
vital » de Bergson et à la « libido » de Freud.) change de
structure pendant le processus de croissance, et se manifeste dans l’individu
avec un intérêt particulier pour certaines activités répétées sans utilité
apparente ; mais, de ces activités répétées, se révèle brusquement une
fonction nouvelle, de façon explosive (Kochkar : En épigenèse,
c’est l’interaction entre les facteurs innés et les facteurs acquis qui fait
émerger un caractère nouveau non préétabli, c’est à dire 100% proviennent du
gène et 100% proviennent du milieu environnant. Le débat entre l’inné et
l’acquis est un débat dépassé, Albert Jacquard.).
Ainsi,
le modèle pour cette fonction a été construit par une maturation qui n’a pas
été visible de l’extérieur (Kochkar : En épigenèse, c’est au niveau
microscopique sur le cortex cérébral qu’on pourrait le voir par imagerie
médicale où les réseaux neuronaux se configurent selon les expériences
vécues.), parce que ces activités répétées ne semblaient avoir aucune relation
directe avec la fonction à laquelle elle a donné naissance ; mais dès que
la fonction commence, ces activités sont abandonnées, l’intérêt conscient de
l’enfant passant à d’autres activités qui prépareront un autre mécanisme (Kochkar : dans l’épigenèse,
c’est le tour à d’autres réseaux neuronaux de se configurer). Si l`enfant est
tenu éloigné de la possibilité de ces exigences au moment où la nature les lui
destine, la sensibilité spéciale qui les stimule s`évanouira ; son
développement, comme sa maturation, en seront troubles.
Si
nous considérons la définition la plus large de maturation apportée dans un
récent texte de psychologie : « la maturation consiste en changements
structuraux qui sont en grande partie héréditaires, c`est-à-dire qui ont leur origine
dans les chromosomes de l`œuf fécondé, mais qui sont aussi, en partie, le
produit d`une activité d`échanges de l`organisme et de son milieu » (Kochkar:
c`est le principe même de l`épigenèse mais sans partition) - et si nous
interprétons ce texte d`après nos constatations personnelles, nous pouvons dire
que nous sommes nés avec un stimulant vital (horme) déjà organisé dans
la structure générale de l`esprit absorbant, et que sa spécialisation et
sa différenciation sont annoncées dans les nébuleuses.
Cette
structure change pendant l`enfance selon la direction de ce que nous avons
appelé, d`après le terme de Hugo Vries, les périodes sensibles. Ces structures
qui guident la croissance et le développement psychique, c`est-a-dire
l`esprit absorbant, les nébuleuses et les périodes sensibles avec leurs
mécanismes, sont héréditaires et caractéristiques de l`espèce humaine. Mais
leur réalisation ne peut s`accomplir qu`a travers une libre activité dans le
milieu.
(…) Si l`on considère que la destinée de l`homme n`est pas préétablie et que,
pour l`enfant, il n`est pas question de réveil, mais de véritable création
psychique, on comprendra combien le rôle du milieu est plus important encore
pour le fils de l`homme. Sa valeur et son importance sont immenses, mais aussi
les dangers qu`il peut présenter. D`où la grande attention que l`on doit porter
au milieu qui entoure le nouveau-né, afin de lui en faciliter l`absorption, et
pour qu`il ne développe pas des attitudes de régression, mais se sente, au
contraire, attiré par le monde où il vient d`entrer. Le progrès, la croissance
et le développement du petit en dépendent, puisqu`ils sont en relation directe
avec l`attraction que peut offrir le milieu.
(…) Le mécanisme du
mouvement est donc très compliqué et très raffiné. Chez l`homme, il n`est pas
préétabli avant la naissance, il doit être construit et perfectionné grâce aux
expériences pratiques. »
3 ème note de
bas de page :
Notre école tunisienne publique
et privée a réussi à enseigner à nos enfants des connaissances sans valeurs ! Citoyen du Monde Dr Mohamed Kochkar, Coordinateur Général Pédagogique de l’Ecole
Montessori Internationale Tunisie - H-Lif
Notre école tunisienne publique
et privée (excepté à ma connaissance
l`Ecole Montessori Internationale) a inculqué à nos enfants durant un
demi-siècle des valeurs antisociales et détruit chez eux les
valeurs positives acquises spontanément dans leurs milieux naturels
respectifs avant l`âge de 6 ans:
1. L`école tunisienne publique et privée a détruit
l`osmose mentale naturelle qui existait
chez les enfants de moins de six ans : Un enfant de
cinq ans est capable de faire comprendre quantité de choses à un enfant de trois
ans. Elle l`a remplacée par l`autorité pesante et non collaboratrice des
maîtres.
2. L`école tunisienne publique et privée a éveillé chez
les enfants de plus de six ans l`envie qui n`existait pas avant six
ans : « Celui-ci a le premier prix, et cet autre a
un zéro. ».
3. L`école tunisienne publique et privée a freiné
l`élan de solidarité chez les enfants et a mis fin à l`esprit d`initiative
personnelle que peut entreprendre chacun d`entre eux : Montessori,
2010, p. 184, a écrit : «les maîtres ne permettent pas aux plus
intelligents d`enseigner aux plus faibles et obligent les premiers à se borner
à répondre quand les seconds ne savent pas. (…) On craint que l`enfant de cinq
ans, occupé à enseigner, ne puisse pas apprendre à son tour ; mais tout
d`abord, il n`enseigne pas tout le temps ; sa liberté est respectée ;
ensuite, il perfectionne, en enseignant, ce qu`il sait déjà : il lui faut
analyser et remanier son petit patrimoine de science pour le passer aux
autres ; il voit ainsi les choses avec plus de clarté, et il est récompensé
par l`échange. »
4. L`école tunisienne publique et privée a développé
chez les enfants des sentiments
déprimants et antisociaux à la place des
sentiments de fraternité, d`amour et d`admiration déjà existants: dans
la classe, l`enfant intelligent devient alors vaniteux ; il acquiert un
sentiment de supériorité sur les autres :
Montessori,
2010, p. 196, a écrit : «Si, pendant toute la période de l`éducation, la
rivalité, l`émulation, l`ambition ont été encouragées, comment attendre que des
gens qui ont grandi dans cette atmosphère soient “bons” a vingt ou trente ans,
seulement parce que quelqu`un leur a prêché la bonté ? Moi, je dis que
c`est impossible, puisqu`aucune préparation n`a été faite à la vie
spirituelle »
Ça
pourrait alors être possible dans une école Montessori, où l`enfant de cinq ans
se sent un protecteur pour son camarade plus jeune. Essayez s`il vous plaît d`imaginer
combien cette atmosphère montessorienne d`affection et d`admiration augmenterait
si elle a été encouragée, amplifiée et approfondie par notre école primaire :
la classe deviendrait un groupe cimenté par l`affection. Les enfants finiraient
par connaître leurs caractères réciproques et s`apprécieraient
mutuellement. Les qualités sociales positives chez les enfants ne peuvent se
construire que dans un milieu Montessori où règne liberté, fraternité et
solidarité. Une ambiance où les relations entre éducateurs et apprenants sont
régies par le respect et la reconnaissance réciproques.
5. L`école tunisienne publique et privée a cloisonné
les niveaux et les disciplines enseignées :
le niveau 1 est rigidement séparé du niveau 2, les disciplines scientifiques
sont séparées des disciplines littéraires, de sorte que les écoliers de sept
ans ne peuvent pas aller chercher des suggestions dans la classe des huit ans
et les apprenants scientifiques du lycée n`ont pas la possibilité de fréquenter
en classe leurs pairs littéraires. Par contre, dans une école Montessori
internationale, les cloisons ne sont que des demi-cloisons, et il est toujours
facile d`accéder d`un niveau à l`autre, si bien que les petits écoliers sont
libres d`aller en avant ou de faire un retour en arrière et les lycéens
littéraires libres d`assister aux expériences dans les laboratoires de leurs
camarades scientifiques.
6. L`école tunisienne publique et privée n`encourage
pas le travail en équipe entre les apprenants voire elle en est hostile :
Elle isole les enfants de la même classe dans des tables monoplaces, ne leur
permet pas de travailler en groupe sur un projet commun et leur interdit même
de s`entraider en cours. Elle n`a laissé le choix aux apprenants qu`entre
égoïsme ou voyeurisme et finit parfois par renvoyer injustement et
définitivement un récidiviste de fraude sans s`attarder sur les causes réelles
de ce phénomène scolaire international.
Montessori,
2010, p. 196, a écrit : « A l`école, il n`est pas permis de copier et
l`on considère comme une faute d`aider un camarade plus faible ; l`écolier
qui aide son camarade en détresse est considère comme coupable au même titre
que celui qui accepte cette aide ; ce n`est pas ainsi que se forme
l`union ; c`est imposer là un principe de morale qui abaisse le niveau
normal. »
7. L`école tunisienne publique et privée a instauré un
système d`évaluation traumatisant pour l`élève : les
apprenants sont condamnés à vivre sous l`épée de Damoclès durant
toute leur vie scolaire. De plus les enseignants-évaluateurs sont investis d`un
pouvoir sans en avoir les compétences nécessaires : ils n`ont jamais
étudié à la faculté les sciences de l`évaluation.
8. L`école tunisienne publique et privée a banalisé le
mépris des enfants faibles ou en difficulté par les enseignants: « âne,
stupide, sot, bougre, vilain, sale, méchant, paresseux, bête, dingue, etc. ».
En général, les éducateurs sont recrutés et payés
justement pour aider les élèves faibles ou en difficulté et non pour les
insulter, offenser, humilier, avilir, briser ou mépriser.
Montessori,
2010, p. 206, a écrit : «La volonté peut être brisée en un moment :
son développement est un processus lent, qui se déroule à travers une activité
continue en relation avec le milieu. La dévastation d`une usine peut survenir
en quelques secondes par un bombardement ou par un tremblement de terre ;
mais combien difficile en est la construction ! »
Jean-Jacques
Rousseau a dit : « Donnez à l`enfant le désir d`apprendre et toute
méthode sera bonne. » (L`Émile, 1792).
Conclusion
L`école
tunisienne publique et privée est satisfaite de ses résultats médiocres car
elle se contente de peu. Elle s`est donnée pour but d`enseigner des
connaissances. L`école Montessori est beaucoup plus ambitieuse, elle enseigne des
connaissances et des valeurs, elle construit l`enfant d`aujourd`hui et l`homme
de demain.
NB : Article largement
inspiré de Maria Montessori, l`esprit absorbant de l`enfant, Desclée de
Brouwer, 1959 ; 2010 pour la présente édition, 241 pages.
4ème note de
bas de page :
Montessori, l`esprit
absorbant, 1959, p. 184 : « La classe des enfants de trois a six ans
n`est pas rigidement séparée de celle des enfants de six a neuf ans, de sorte
que ceux de six ans peuvent aller chercher des suggestions dans la classe
suivante. Nos cloisons ne sont que des demi-cloisons, et il est toujours facile
d`accéder d`une classe a l`autre, si bien que les petits écoliers sont libres
d`aller en avant ou de faire un retour en arrière. »