lundi 3 mars 2014

Une misogynie transparaît dans les écrits de nombreux théoriciens sunnites ! Yadh Ben Achour

Une misogynie transparaît dans les écrits de nombreux théoriciens sunnites ! Yadh Ben Achour

Source bibliographique
Aux fondements de l’orthodoxie sunnite, Yadh Ben Achour, Cérès éditions, 2009, Tunis, 297 pages

Page 237
Ce type de représentation peut aboutir à une misogynie certaine. Cette dernière transparaît dans les écrits de nombreux théoriciens sunnites, en particulier Ghazâlî et Ibn al Jawzî. Sur le mariage, l’amour, l’appétit sexuel, l’auteur de l’Ihyâ. . . adopte des points de vue dévalorisants, toujours sur la base que la femme et l’amour détournent de Dieu, au même titre que les passions et la richesse, du jeu ou de la gourmandise. Par voie de conséquence, il adopte, pour les femmes, une éthique de la claustration. Ibn al Jawzî consacre un ouvrage aux règles du shar’ sur les femmes, ahkâm a-nisâ’. Il reprend à son compte l’éthique de la claustration. Cela montre clairement qu’il faut revoir l’idée selon laquelle l’islamisme des temps présents n’a rien à voir avec l’islam. Les hanbalites sous les Abbasides, les Almohades, les talibans, les wahhabites, tous ces courants fondamentalistes expriment une lecture possible. C’est toujours l’idée de revivification qui prévaut, lorsque la dégradation des mœurs devient intolérable pour l’esprit croyant intégral

En tout état de cause, pou tous ceux-là, l’affaire est entendue. Le verset 34 de la sourate des Femmes est affirmatif : « Aux hommes est reconnu un droit de regard sur les femmes ; ce droit est fondé sur les avantages que Dieu a conféré aux hommes, et il fait pendant aux charges de famille qui leur sont imposées. Les femmes vertueuses restent fidèles à leurs époux absents, et maintiennent intact ce que Dieu a prescrit de conserver. Pour celles que vous craignez l’inconduite, vous pourrez les blâmer, les éloigner de votre couche, les corriger même (note de bas de page 2 : Traduction quelque peu édulcorée. En fait, il s’agit bien d’une permission de les battre (adhribûhunna)), si besoin est. Si elles se font soumises, vous ne tenterez plus rien contre elles. En vérité Dieu est très haut et très grand ! » (trad. Mazigh). Tabarî explique que ce verset autorisant les peines correctives simplement légères fut révélé à l’occasion d’une plainte adressée au Prophète par une femme giflée par son époux. Le prophète ordonna d’abord le talion. Il se ravisa, après la révélation de ce verset, disant : « j’ai voulu une sentence et Dieu en a ordonné une autre. » A partir de ces éléments, un univers mental inégalitaire, d’une incroyable densité, allait être élaboré par les architectes du sunnisme, et en premier lieu par les codificateurs des hadiths

Les shaïkhân, les deux maîtres, Bukhârî et Muslim, incorporent dans leurs recueils, des hadiths concernant les droits de l’homme sur sa femme, la colère des anges du ciel lorsqu’une femme se refuse à son époux ou provoque son courroux, le devoir d’obéissance de l’épouse. Tirmidhî va plus loin. Il avance un hadith d’après lequel le prophète aurait affirmé : « S’il m’avait été donné d’ordonner à quelqu’un de se prosterner devant quelqu’un d’autre, j’aurais ordonné à la femme de se prosterner devant son époux. » La liste de ce genre de jugements est infinie. Inutile d’insister

La doctrine sunnite dominante du fiqh porte clairement les marques de cette inégalité dans les domaines de la sexualité, de la libre disposition du corps, de l’héritage où la femme compte pour moitié, de la compensation pénale, du témoignage, du mariage, de la répudiation, de la filiation et du nom , de la liberté de voyager et de se rendre au pèlerinage, de la direction des prières (imâma) et, a fortiori, de l’imamat suprême, interdites aux femmes. Si nous considérons l’exemple du seul Maghreb, c’est l’école juridique malékite qui constitue cette couverture savante de l’ordre sexuel et identitaire. Elle est représentée par des personnalités natives de Kairouan, Tunis, Sfax, Fez, Marrakech, comme Suhnûn, Ibn Abî Zaïd al Qaïrawâni, ‘Iyâdh, Lakhmî, Ibn ‘Arafa, Burzulî, Jazûlî, Mâzirî, etc. cette tradition d’une extrême et rigide sévérité à l’égard des femmes. Elle admet en effet le droit de contrainte matrimoniale, la prohibition des emplois publics, l’exclusion de l’héritage des descendantes devant la parenté agnatique, en sus des règles admises par toutes les écoles sunnites

Sans qu’il soit besoin d’y adjoindre les strates constituées par la poésie des poètes et des conteurs, la pyramide des normes est solide, massive et tenue pour vérité. C’est cette pyramide que les réformistes, les modernistes et les libéraux ont tenté et tentent encore aujourd’hui de faire tomber

Date de la première rediffusion sur mon blog et mes deux pages facebook
C. M. Dr M. K., Hammam-Chatt, mardi 4 mars 2014





Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire