vendredi 27 mars 2015

L`enfant méprise tout ce qui est atteint et aime tout ce qui est à atteindre. Maria Montessori

L`enfant méprise tout ce qui est atteint et aime tout ce qui est à atteindre.  Maria Montessori

Bibliographie : Maria Montessori, Pédagogie scientifique, tome 1 : La maison des enfants, éditions Desclée de Brouwer, 1958, Paris 2010 pour la présente édition, 261 pages (premier ouvrage de la Doctoresse paru en France en 1926).

Biographie : Maria Montessori née en Italie en 1870, décédée en 1952, 1ère femme italienne diplômé docteur en médecine. Elle était également licenciée en biologie et en philosophie. Elle fit des études de psychologie. En 1904, on lui confia une chaire d`anthropologie à l`Université de Rome après la publication de son premier livre L’Anthropologie pédagogique.

Page 241 : « j`observai un jour, dans notre jardin de Pincio, à Rome, un enfant d`environ un an et demi, qui s`amusait à remplir un petit seau avec des cailloux. A côté de lui, une nurse très distinguée, évidemment pleine de bonne volonté, avait pour lui les soins les plus affectueux. C`était l`heure de s`en aller, et elle l`exhortait patiemment à abandonner son travail et remonter dans sa petite voiture. Comme ses exhortations échouaient devant la volonté de l`enfant, la nurse emplit elle-même le seau de cailloux, puis le déposa avec l`enfant dans la petite voiture, convaincue qu`elle l`avait ainsi satisfait. Les hurlements, l`expression de protestation contre la violence et l`injustice que reflétait le petit visage me frappèrent. Quelle accumulation d`offenses emplissait ce cœur ! Le petit ne voulait pas que le seau fût plein de cailloux : il voulait faire l`exercice nécessaire à le remplir ; c`est cela qui répondait à la nécessite de son organisme orgueilleux. C`était sa formation intérieure, qui était son but, et non le fait extérieur d`avoir un seau rempli de cailloux ! L`attachement si vif au monde extérieur était une apparence : le besoin vital, une réalité. En effet, s`il avait rempli le seau, il l`aurait sans doute vidé encore pour le remplir à nouveau jusqu`à satisfaction complète. C`était bien pour cela que je l`avais vu, peu de temps avant, le visage rose, tout souriant : la joie intérieure, l`exercice et le soleil collaboraient tous trois à cette splendide vitalité.

Cet épisode tout simple est un exemple de ce qui arrive à tous les enfants du monde, les mieux aimés. Ils ne sont pas compris parce que l’adulte les juge à sa propre échelle : nous pensons que l’enfant est préoccupé de buts extérieurs, et nous l’aidons amoureusement à les atteindre, alors que son but inconscient et de se développer lui-même. C’est pour cela qu’il méprise tout ce qui est atteint, et qu’il aime tout ce qui à atteindre. Ainsi, il préfère l’action de se voir habiller, fût-ce magnifiquement ; il aime l’action de se laver plus que le bien être de se sentir propre ; il aime se bâtir une maison, plus que de la posséder. Il ne doit pas jouir de la vie, mais se la construire.

Le petit enfant de Pincio en est un symbole : il voulait coordonner ses mouvements ; exercer ses forces musculaires en soulevant des objets ; exercer son œil à l’évaluation des distances ; exercer son intelligence dans le raisonnement relatif à l’action de remplir son seau ; et voilà que celle qui l’aimait, croyant que son but était de posséder des cailloux, le rendait malheureux ! »

Page 243 : « Toujours imbus de ce préjugé que le but à atteindre est extérieur, nous habillons et nous lavons l’enfant, nous lui arrachons des mains les objets qu’il aime tant manier ; nous lui donnons à manger. Et après cela, nous le jugeons incapable. Nous le trouvons en outre impatient, quand c’est nous qui n’avons pas la patience d’attendre que ses gestes obéissent aux lois du temps, différentes des nôtres ; et tyrannique précisément parce que nous employons la tyrannie.

(…) Qu’adviendrait-il de nous, si nous tombions au milieu d’une population de gens très rapides dans leurs mouvements, dans le genre de ceux qui étonnent et font rire, au théâtre, par leurs transformations immédiates ? Continuant à nous mouvoir selon nos habitudes, nous nous verrions assaillis par ces gens qui se mettraient à nous habiller, en nous ballottant, à nous nourrir sans nous donner le temps d’avaler, à nous arracher des mains le travail pour l’accomplir plus vite eux-mêmes, à nous réduire à une inertie indiciblement humiliante. Ne sachant pas nous exprimer, nous nous défendrions à coups de poing et avec de grands cris contre ces forcenés ; eux pleins de volonté, dépités, nous traiteraient de méchants, de rebelles, de bons à rien !
Nous aurions beau dire à ces gens : « Venez dans notre pays ; et voyez une splendide civilisation faite par nous ; voyez nos œuvres » ; ils n’en croiraient pas leurs yeux.
C’est un peu ce qui se passe entre les enfants et nous !

Signature du Citoyen du Monde Dr Mohamed Kochkar, Coordinateur Pédagogique Général de l’École Montessori Internationale Tunisie - H-Lif 
 « Pour l’auteur, il ne s’agit pas de convaincre par des arguments ou des faits, mais, plus modestement, d’inviter à essayer autre chose » Michel Fabre & Christian Orange, 1997
« À un mauvais discours, on répond par un bon discours et non par la violence » Le Monde Diplomatique

Date de la première publication on line : Hammam-Chatt, vendredi 27 mars 2015.





Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire