mardi 30 avril 2024

Préface d’Habib Ben Hamida, philosophe d’Hammam-Chatt (Mon 11e livre "نقد اجتماعي", à paraitre prochainement)

 

 

Critiquer, c`est dire non à la confusion  et c’est justement ce que fait dans ce livre notre ami Mohamed Kochkar

C`est la confusion qui explique en dernière analyse le désespoir de nos intellectuels. Car la confusion est la vraie source de désordre, de l`anarchie et du chaos ; elle est guidée par un désir de régression, un désir pathétique destructeur qui exprime une attitude rétrograde de celui qui veut quitter l`univers humanisé ; celui qui, par son égoïsme bestial menace de faire table rase de tous les impératifs catégoriques, de tous les principes inviolables et de tous les acquis irréversibles de notre humanité.

On ne peut pas confondre, à proprement parler, le juste et l`injuste, le mérite et le démérite, la bonne et la mauvaise volonté, la vertu et le vice, le simple et le complexe, bref le bien et le mal, le vrai et le faux…

Quand toutes les valeurs sont sur le point de sombrer, et que les opinions éclatent dans toutes les directions, qui arrêtera notre chute dans l`abime du désespoir ?

Et c`est dans ce sens que la critique, en tant qu`effort de distinction, de clarification, de mesure, d`analyse et en tant que principe d`ordre, devient la voie royale qui nous rattache encore à la raison créatrice et à la renaissance vitale. La critique, en effet, ne nous précipite pas dans le délire et la folie ; car elle n`ajoute pas de surcharges arbitraires et gratuits, elle accouche, au contraire, selon l`ordre rationnel, d`un univers libéré de la nébuleuse des opinions et du nihilisme radical ; la critique annonce tout haut notre colère, notre révolte et notre indignation devant ce spectacle de désolation ; car l`intellectuel authentique, à l`image de Kochkar, refuse de s`embourber dans l`ivresse de la confusion et les ténèbres de l`inconscience. Dire non, c`est affirmer la possibilité de la critique et l`efficacité du logos en lutte contre toutes les confusions.

 

Phobie de la critique et critique de la phobie

La tyrannie commence par l`interdiction de la pensée critique. La phobie de la critique est une véritable perversion de l`esprit, car seule l`innocence de la parole libérée de tous les interdits, à travers le dialogue, la discussion, le débat, restitue à l`homme sa vraie vocation d`être un « un roseau pensant ».

Celui qui refuse la critique a une peur instinctive ; il est entravé par la panique à fuir en arrière loin du danger et de l`aventure. C`est un être affolé qui fait demi-tour, tourne le dos au devenir ; il est en proie à la débandade et à la confusion, il se replie sur soi, c`est-à-dire se réfugie dans la nuit de sa primitivité et rétrograde ainsi vers les profondeurs de son passé biologique.

La phobie est donc une capitulation, un aveu d`impuissance et une rupture de notre rapport au monde ; elle est le propre d`un être frileux et lâche.

Par contre l`être courageux refuse d`être neutralisé par la pensée de la fuite ; il accepte le débat, l`ouverture sur l`altérité ; il communique dans l`égalité et la réciprocité.

C`est la raison pour laquelle la critique est un acte d`indépendance par lequel on retrouve la spontanéité et la liberté de parler à partir d`une conscience bien intentionnée d`aller en avant vers son prochain. La critique brise ainsi notre solitude et rétablit directement le contact avec autrui. Enfin la critique, tout en nous libérant, de notre égoïsme et de nos instincts rétrogrades, inaugure une nouvelle ère de recherche pour un esprit dont le signe est de créer, de construire et d`enfanter dans la joie.

Socrate, le prédateur de la philosophie n`a-t-il pas prouvé par son courage que le postulat de la recherche de la vérité, c`est la critique.


 

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